Au commencement de la liberté…

mercredi 15 février 2012
par  Paul Jeanzé
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Il y a environ un an, alors que débutais à peine l’année 5772 et que je découvrais le défilement régulier et immuable des parachiot, je me souvenais avoir tracé dans la marge du livre de Léon Askénazi intitulé Leçons sur la Torah un grand point d’interrogation devant le commentaire suivant :

[…]Pour la parole biblique, D. est une évidence, parce que l’homme est une évidence. L’objet de la perplexité, c’est le monde, car l’existence du monde est une énigme.

Il faut bien avouer que ce qui était une évidence pour le maître représentait déjà une énigme pour moi. Non pas que je niais l’évidence, mais plutôt qu’il m’était bien difficile de trouver cette évidence évidente. Quant à l’énigme qui s’en suivait, il était encore trop tôt pour parler d’un début de commencement de réflexion. Il n’est pas fini le temps où l’on trouvera une réponse au commencement.

Peu de temps après, je tombais sur cette histoire, dont je ne me rappelle malheureusement plus quelle pouvait en être la source. Néanmoins, je vous la livre telle que je l’avais alors consignée :

Un païen demanda un jour à Rabbi Akiva : « Qui a créé le monde ? »
« Dieu a créé le monde », répondit Rabbi Akiva.
« Prouve-le-moi ! »
« Reviens me voir demain », lui répondit Rabbi Akiva.
L’homme revint le lendemain. Rabbi Akiva lui demanda : « Que portes-tu ? »
« Une cape, comme tu peux le voir. »
« Qui l’a faite ? »
« Le tisserand, bien évidemment. »
« Je ne te crois pas, prouve-le-moi ! » dit Rabbi Akiva
« De quelle preuve as-tu besoin ? Ne vois-tu pas que c’est le tisserand qui a fait cet habit ? Un habit se tisse t-il tout seul ? »
« Alors pourquoi me demandes-tu une preuve que Dieu créa le monde ? Tu viens de donner la réponse : Ne vois-tu pas que c’est le Saint, béni soit-Il, qui l’a créé ? »

Nuls doutes que cette histoire m’avait aidé à avancer dans mes réflexions puisque je me souviens m’être écrié à ce moment là :

Et voilà, début de l’histoire !
Pardon, fin de l’histoire voulais-je dire.
A moins que dans tout début se cache déjà une part de finalité…

Au final, je n’étais pas certain d’avoir beaucoup avancé. Peut-être que la finalité qui m’échappait alors était de me retrouver un an plus tard au moment même où, dans un même mouvement, Vezot habera’ha allait céder sa place à Berechit, non plus à me poser la question du commencement mais plutôt la façon dont j’avais pu interpréter le texte et le sens que j’avais donné aux mots. C’est ainsi qu’à force de me focaliser sur cette histoire d’évidence, peut-être avais-je oublié de me concentrer sur le début de la phrase, à savoir « Pour la parole biblique ». Sans doute aurais-je dû me poser la question de la façon suivante, à savoir :

Pour moi, D. est-il une évidence parce que l’homme est une évidence ?

Est-ce vraiment la réponse qui est difficile ou le simple fait de le dire ou de le mettre par écrit ?
De la même façon qu’il est parfois (souvent ?) difficile d’avouer ses sentiments à l’homme ou la femme que l’on aime, sans doute est-il également difficile de s’engager sur des chemins qui nous emmènent face à nous-mêmes et nous obligent ainsi à faire des choix où seul devra compter notre libre arbitre.

Alors D. est-il une évidence parce que l’homme est une évidence ?
Aujourd’hui, pour moi, la réponse est clairement : « oui »

Accepter à connaître et à reconnaître cette évidence en pleine conscience, c’est alors faire un premier pas vers la liberté.

Zevoulon - Le 10 octobre 2012


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